Colonnes d’insectes

A partir de 18 heures, de drôles de colonnes d’insectes géants à la carapace bleu marine, rampent le long des palaces. Numérotés, sobres ou à fanions frangés.

Plus rarement, l’un d’eux est entouré de quatre hommes en noir, baraqués, qui courent à côté de lui : il s’agit d’une espèce précieuse, comprenez bankable, venue tout spécialement des Etats-Unis. La reine des insectes est précédée de deux motos tous chromes dehors, destinées à éloigner des ennemis imaginaires, ceux que l’on nomme « badauds » : créatures communes arrêtées au bord du trottoir, fascinées par le défilé.  Les cortèges s’étirent sur un rythme saccadé et, tel le passage d’une colonne de fourmis dans une forêt tropicale, laissent la Croisette vide, abasourdie.

Dans la dernière partie du parcours, les insectes empruntent une voie réservée, barriérée, qui les conduit inexorablement au pied des Marches. C’est là qu’avec la régularité des tortues des Galapagos, ces drôles de bêtes viennent expulser leur précieuse substance étoilée, nommée « star ».

Sorties Alpha plus des pouponnières d’Aldous Huxley, les stars sont naturellement (ou presque !) belles, réhaussées de brins d’étoffes précieuses et de diamants éphémères. Montée des Marches, red carpet. Elles se saisissent de toute la lumière et, tout en haut, disparaissent avec elle.

En bas, les colonnes d’insectes s’éloignent, un peu lasses. Elles reviendront plus tard reprendre ces créatures fantasmées, blessées par les sifflets ou survoltées par une standing ovation.

Magnifique !

1925 : « Gatsby le Magnifique » signé Francis Scott Fitzgerald. 15 mai 2013 : Leonardo « le magnifique » est arrivé à Cannes. Au programme : conférence de presse, photo-call, montée des marches, ouverture du 66e Festival de Cannes, dîner. « The » journée d’une star.

Mon vol low-cost Paris-Nice va me permettre de rater une grande partie de ces festivités et, cerise sur le gateau, je pense que je ne suis pas prévue sur les plans de table.
Je conserve toutefois un tout petit bout de rêve : que Leonardo DiCaprio croise le taxi qui arbore sa vitrophanie.

J-1 : la course aux vitrophanies

Sur le parking de l’hôtel de ville à Cannes, tôt ce matin, chorégraphie d’un étrange ballet de taxis. Ils arrivent à tour de rôle et s’immobilisent en douceur. Personne n’en descend. Personne ne monte non plus. Un ou deux photographes attendent, discrets et patients.

Soudain, les poseurs de vitrophanies s’avancent : professionnels minutieux, ils traquent sans relâche plis et bulles. Pour incarner la réalité, l’illusion doit être parfaite (à vérifier peut-être !).
Un peu plus tard, la voiture repart en souplesse. A son bord a pris place une star…